Pour qui aime se faire secouer dans un vacarme époustouflant et qui n'est pas du tout pressé, je conseille de prendre le train au Sri Lanka. Je vous jure, c'est une expérience à vivre.

J'ai embarqué à 09h30 à la gare de Jaffna pour parcourir 180 km jusqu'à Anuradhapura, et j'ai mis 5 heures pour arriver à bon port.

Christine, ma sexagénaire d'hier soir prend le même train que moi. Elle avait acheté un billet 2ème classe avec réservation la veille, alors que moi je prends mon billet sur place pour une seconde aussi.

Je paie 40% moins cher. Etant tous les deux en seconde nous devons tout de même nous placer dans des wagons différents. Avec ou sans réservation c'est pas pareil. Et puis le contrôleur est clair... filez dans l'autre wagon.

A vos ordres chef ! Même si le train est vide. Snif !

Chaque démarrage, freinage ou arrêt suscite des secousses terribles dans un fracas de ferraille énorme.

Tiens, un vélo nous dépasse.... Moi qui croyait aller plus vite qu'en bus, foutaise ! Ce n'est pas grave, ça fait partie du voyage.

Anuradhapura change vraiment d'atmosphère par rapport au nord. On sent que l'activité touristique est présente, même si elle ne semble pas intense.

Les tuk tuk nous harcèlent un peu, les uns après les autres. Lorsqu'un homme m'aborde gentiment pour parler, ça se ponctue souvent par... tu me donnes 200 roupies.

J'avoue que ça m'agace un peu, mais ils le font toujours avec le sourire.

Pour les 2 nuits que je vais passer ici j'ai pris un hôtel assez sympathique avec un accueil charmant.

Une sieste ne me fait pas de mal après avoir passé toutes ces heures dans un shaker et je file me promener au bord du lac principal de la ville. Ouf, du calme et pas de voiture. Juste un chemin, de l'eau, du vent, des oiseaux, et.... 😡 des scooters.

J'assiste à un joli coucher de soleil sur les stupas du site que je vais visiter demain.

Ma journée s'arrête là, car une grosse fatigue me prends d'un coup...

Debout 07h15, petit déjeuner 07h30, choix du vélo 07h50... Allez allez, hop hop c'est parti pour la visite du site archéologique de la ville. C'est sans doute l'un des sites les plus importants du pays, alors pas question de le faire dans de mauvaises conditions.

Dès l'ouverture, le soleil n'est pas encore trop chaud et je pourrai flâner à ma guise dans les endroits propices au calme.

Ce site est très étendu. Il fait plus de 10 km de long sur environ 7 de large. Ceci explique mon choix du vélo pour aller d'un lieu de visite à un autre, et il s'est avéré être une bonne option.

Après avoir pris mon billet qui couvre la totalité du site, pour la maudique somme de 4550 roupies, soit environ 23€ (cher pour le Sri Lanka ) j'essaie de m'orienter parmi toutes les petites rues, chemins, qui partent dans toutes les directions. Il y a très peu d'indications et à l'entrée aucun plan n'est donné.

Je me demande s'ils ne font pas exprès pour pousser les visiteurs à prendre un guide. Bon, je commence un peu à m'orienter, mais sincèrement ce n'est pas facile.

Les stupas (monuments hémisphériques dans lesquels sont enfouis les os de bouddha ou de ses disciples) sont énormes. Pour rentrer dans leurs enceintes, il faut se déchausser et se découvrir la tête. La visite consiste à tourner autour et observer chaque détail des sculptures. Ce qui n'est pas évident à comprendre.

Des centaines de cinghalais souvent habillés en blanc viennent là pour faire des offrandes à bouddha, bénir certains objets, ou encore rentrer dans des prières parlées ou chantées. Il y a là, une réelle ambiance religieuse.

Je ne vois que très peu de blancs. Enfin je veux parler de touristes.

Mais... j'entends tout d'un coup un couple parler français 😁 Je m'approche discrètement, l'air de rien, et hop je dis bonjour !

Le reste se fait tout seul. Tu es d'où, depuis combien de temps tu es au Sri Lanka, etc etc.

Il s'agit de Véronique et Nervin (🤔) des Vosges, et font un trip vélo à travers le pays. Quelle belle idée.

L'autre très bonne idée, est qu'ils ont pris un guide qui a l'air super sympa, et ils lui demande si je peux me greffer à eux. Aucun soucis. Chouette, je vais mieux comprendre, et surtout moins chercher.

En effet, il nous emmène par des petits singles (oh pardon, des petits sentiers) dans la forêt pour nous montrer des ruines très intéressantes que je n'aurais pas trouvé seul.

Non, non, je ne vous raconte pas toute ma visite... ce serait d'une part beaucoup trop long, et je risque d'en oublier au passage.

Toujours est-il que j'ai appris plein de trucs et dormirai ce soir plus instruit.

Une petite averse nous surprend et nous permet de nous arrêter boire et manger une coco bien méritée.

A la fin de cette visite instructive, je propose au guide de lui donner un billet, ce qui me paraissait normal, mais il a refusé en disant qu'il avait deja été payé pour sa prestation. Waouh, correct le Monsieur.

Je lui donne quand même 1000 roupies et il me remercie chaleureusement. Je quitte mes vosgiens forts sympathiques en nous disant qu'on devrait se revoir un de ces jours.

15 minutes de vélo supplémentaires pour rentrer à l'hôtel vers 13h00.

Mine de rien une trentaine de kilomètres sous cette chaleur avec un vélo des années 1920, des pneus plus étroits qu'un vélo de route avec des freins a tringles, c'est du sport.

Je me restaure à coup de petites bananes délicieuses et me repose un peu.


Mihintale

Et puisque la journée est vouée à la culture et que j'ai encore la pêche, le second site à visiter absolument est Mihintale.

D'après tout ce que je lis sur cet endroit est hyper positif. Il se trouve à 12 km d'Anuradhapura, et encore une fois j'ai le choix entre bus et tuk tuk.

Bus ! Comme ça pas d'horaires pour rentrer car les chauffeurs de tuk tuk augmentent leur prix en fonction du nombre d'heures d'attente que je ne maîtrise pas du tout pour le retour.

12 km en 30 mn pour 39 roupies. Je vous laisse faire la conversion maintenant.

Arrivé dans cette bourgade, je dois marcher 1 km pour commencer mon ascension sur les 4 collines que composent ce site sacré. Je me fais interpeler par un tuk tuk qui me propose de m'y emmener sans me demander la moindre roupie.

A rien y comprendre.

Ici, le calme règne. Une guitoune de police à l'entrée du site me salue et me pose les mêmes questions que beaucoup : tu es tout seul ? Tu as une femme ? Quel est ton pays (entendre en cinghalais "ganty pour country), tu as une famille ?

Une fois ces mondanités terminées, je suis face à un immense escalier de 190 marches, toutes plus irrégulières les unes que les autres. J'arrive à ce premier palier en pleine forme malgré une grosse chaleur. Deux options s'offrent à moi. Tout droit ou à droite. Je pense que la première est la plus classique, alors choix sur la seconde, et un nouvel escalier plus raide encore arrive sur un très vieux Stupa en briques. Personne... des chants d'oiseaux, et des feuillages bruissent sous le vent et les jeux des singes.

Ce choix a été le bon. Tout d'un coup j'aperçois au loin un homme, balayeur de son état, torse nu me faire de grands signes et s'approche. Après avoir répondu aux mêmes questions qu'en bas, voilà que mon balayeur me lance un "Bonjour, comment vas tu" et m'explique qu'en écoutant les touristes français il avait appris à parler un peu notre langue.

Cette rencontre fut extraordinaire, car il m'a tout expliqué sur ce stupa, son amour pour ce lieu, et aussi m'a guidé vers les coulisses du monument. Là où les moines s'installaient par centaines pour méditer dans des abris naturels, des cavités, des grottes, faits d'immenses rochers granitiques enchevétrés les uns sur les autres. C'est absolument incroyables !

Je suis sur le c... oh pardon !

Il me fait une très belle démonstration de la position méditative, et m'incite à faire de même. Ma souplesse légendaire me donne l'air un peu gauche comparativement à mon guide, mais peu importe. Je me sens bien en sa compagnie.

On continue à escalader les rochers pour accéder à des points de vues superbes et exclusifs toujours entourés d'oiseaux et de primates joueurs.

Dans une faille de roche, il me dit qu'il y a des chauve souris, et qu'il ne faut pas leur faire peur. Il me dit quand même que je peux les photographier. Je ne vois rien et vise à l'aveugle dans le trou. En plein dans le mille. Elles dorment tranquillement les yeux ouverts, manifestement imperturbables.

Cette première étape de Mihintale est un enchantement et nous nous disons au revoir chaleureusement. Je reste sous le charme.

L'étape suivante est la partie payante, ou je retrouve un peu de monde (je dis bien un peu), mais toujours beaucoup plus de locaux que de blancs ou jaunes. Des touristes quoi...

Ici-même va commencer mon supplice. Autant en Thaïlande, nous devons nous déchausser dans les temples. Ici c'est dans toute l'enceinte sacrée qu'il faut le faire. Et vu l'état de mes pieds, marcher pieds-nus sur des cailloux, des roches, des escaliers ou des branches devient pour moi une réelle épreuve. Mais que puis-je refuser à Bouddha ?

Le lieu est magique. Une grande place centrale revêtue de sable et gravillons, au milieu de 3 collines chacune très différentes.

Je les escalade toutes en commençant par celle d'un Bouddha blanc assis, majestueux qui n'a pas bougé un doigt depuis des siècles. Je suis tout seul à ses pieds. Un singe est près de moi presque surpris de me voir là. Sous mes yeux les deux autres monticules sont écrasés par un soleil de plomb. Après m'être ressourcé un peu je dois attaquer la descente par des marches qui n'en sont pas vraiment. Juste des toutes petites echancrures taillées dans la pierre pour des pieds de liliputiens.

P.... que j'ai mal 🤐

Ma seconde souffrance va vers un stupa blanc face a l'ouest, et vue sur Anuradhapura. Je ne rentrerai pas dans les conditions d'ascension toujours aussi douloureuses.

Mais je résiste. Pas question de renoncer. Là haut, une grande esplanade tourne autour du monument funéraire rafraîchi par un vent assez soutenu. C'est très agréable, surtout avec la chaleur commençant à décroître petit à petit. En voulant prendre en photo quelques singes, il y en a un qui a dû estimer que je m'approchais trop, et est venu me filer un coup de patte sur le mollet. J'ai eu à ce moment une pensée émue pour mon pote JM qui, en Thaïlande, s'était fait agressé par un gibon pour la même raison.

La lumière devient aussi un peu plus rasante, et permet de mieux apprécier les couleurs des paysages sous nos pieds. Rizières et palmeraies se partagent mon horizon.

Je reste là un bon moment. Je ne dirai pas que je médite au sens propre du terme, mais suis capable d'être simplement là. Et bien d'être là.

The last one, est un rocher à escalader avec une main courante tellement c'est raide et le rocher lisse d'usure de pas humains.

Sincèrement, je crois ne pas y arriver. Si ma chère kiné me voyait, elle me dirait "Non Patrice NON ! Elle se reconnaîtra 😉

Et bien si, j'y vais rien que pour admirer le soleil descendant derriere le stupa blanc. La descente fut.... chut !

Quel soulagement de remettre mes chaussures en sortant. Je dois encore redescendre tout en bas les 200 premières marches. Mais tout me semble facile. Je me sens léger et tellement content de cet après midi enrichissant et plein d'énergie.

Pour moi, ce site est un petit Machu Picchu au niveau de l'energie quil degage, la maniere d'eriger sur des reliefs au milieu de "rien" et egalement des techniques de taillage de pierres pour certains murs. Étrange ressemblance pourtant aux antipodes.

Je n'ai même pas envie de rentrer a l'hôtel. Je traîne dans la ville jusqu'à la nuit noire et mange un morceau dans un de ces petits restaurants où les touristes ne vont pas.

Après une nuit très réparatrice, mes pieds me font vraiment souffrir. Ça passera !

Aujourd'hui le 14, ce sera transport en commun et repos.